"À Corps", au « MusVerre", à Sars-Poteries, jusqu'au 04 Janvier 2026

« L’être humain ressemble à un instrument musical complexe, unique et délicatement accordé. Chaque atome, chaque molécule, chaque cellule, chaque tissu et chaque organe du corps émettent continuellement les fréquences
de sa vie physique et émotionnelle. La voix humaine renseigne sur la santé du corps et relie les individus au cosmos. Qui crée de la beauté en jouant, qui crée de l’harmonie musicale, commence à comprendre de l’intérieur
ce qu’est l’harmonie essentielle, l’harmonie humaine » (Joaquin Solano/2012).
« La sublimation par excellence s’énonce comme ce qui échappe à la tyrannie du corps » (Patrick Merot).
Peu connu en Belgique, le « MusVerre » (« Musée du Verre »), sis à Sars-Poteries, Municipalité du Nord, de moins de 1.500 habitants, nous propose, jusqu’au dimanche 04 janvier 2026, son exposition temporaire « À Corps ».
Au coeur des questionnements contemporains, le corps interroge les artistes verriers et plasticiens par ses multiples facettes. L’exposition « À Corps » nous invite à examiner les subtils rouages de l’enveloppe charnelle, du mouvement à l’immobilité, du détail à l’ensemble. À travers un parcours riche en contrastes et en sensibilité, elle offre une occasion unique de contempler cette mécanique vivante dans ses limites et ses mérites.
Tantôt vulnérables et authentiques, tantôt sublimés et poétiques, les éléments corporels représentés deviennent le support d’un message, d’une vérité ou d’un symbole.
« À Corps » devient ainsi une invitation à un examen de soi, où la beauté et la complexité de l’organisme humain sont questionnés au prisme du regard des artistes.
A peine entrés dans le hall du Musée, nous découvrons, suspendus au plafond, trois grands cœurs de verre interconnectés, reliés par des tubes et des appendices charnus à une multitude de fleurs, une œuvre monumentale, « Flowering out into the world », crée in situ, de l’artiste allemande Simone Fezer (°1976).
Cette installation foisonnante fait référence, pour l’artiste, à notre capacité à nous relier aux autres, à notre
interdépendance pour vivre et à la force du collectif pour évoluer et s’épanouir.
Notre compatriote Wim Delvoye (°1965), par le recours à l’imagerie médicale, nous présente deux vitraux, réalisés à la manière de dessins d’anatomies, nous amenant, jouant sur la transparence du vitrail, à découvrir une intimité encore plus profonde du corps et des relations humaines.
Au-delà de la prouesse technique et de son aspect spectaculaire, créée en 2006, par l’artiste français Philippe Beaufils (°1956), « Liens », une oeuvre suspendue dans les airs, constituée d’un squelette de verre entièrement soufflé, il cherche à observer la place de l’être humain dans le monde, exprimant la discontinuité de l’âme humaine, d’une humanité en perpétuel dilemme avec une individualité indissociable du corps.
Passant d’un squelette à la chair, nous nous intéressons, dans la dernière salle, à une oeuvre, de l’artiste ukrainienne Janusz Walentynowicz (°1929), inspirée des « tondi », un format prisé par les peintres et sculpteurs de la Renaissance , pour sa symbolique du cercle, comme modèle de perfection, la figure humaine y étant représentée dans sa dimension la plus sensible, cherchant à traduire toute la gamme des émotions, au travers de la gestuelle du corps et de l’expression du visage. Ici, l’artiste joue de la contrainte du cercle pour représenter un corps en torsion, innovant par sa parfaite maîtrise de la technique de la peinture sur verre inversée.
Cette oeuvre, parmi d’autres, d’une artiste féminine, nous interroge sur la place de la femme dans l’histoir de l’art et
de la société, à travers des œuvres puissantes et engagées.
Autre oeuvre exposée dans cette même salle, « Glass Gellage » (voir la photo dans l’entête du présent article), réalisée en 2021, par l’artiste tchèque Michal Macku (°1963), nous présentant une photographie, sur verre, de corps démultipliés, captant notre regard, nous interpellant, nous plaçant face à des silhouettes, qui semblent contraintes, retenues, empêchées derrière le verre.
Avec « À Corps », les nombreuses facettes du corps humain nous sont révélées par le regard singulier d’artistes verriers et de plasticiens. En mouvement ou au repos, du détail à l’ensemble, nous sommes invités à nous pencher sur les subtiles mécaniques du vaisseau charnel.
À travers une diversité de perspectives, la présente exposition propose une exploration minutieuse de l’organisme humain, nous guidant dans un parcours captivant, où le corps passe du trivial au sublime.
Au-delà de cette présentation, ci-dessus, de 5 des 28 oeuvres exposées au sein de l’exposition temporaire « À Corps », recommandons la découverte, au sous-sol & au premier étage, de l’intéressante collection permanente du « MusVerre », un musée qui vit le jour, en 1967, avec une première exposition consacrée aux « bousillés », des objets en verre, réalisés, pour eux-mêmes par des ouvriers, durant leur temps de pause.
Notons que – riche d’un sous-sol argileux et siliceux, ayant suscité un passé potier, particulièrement au XVIIè et au XVIIIè siècles – Sars-Poteries fut, durant le XIXè siècle, une capitale industrielle du verre creux, avec deux verreries, qui, ayant compté jusqu’à 800 ouvriers, entre 1802 et 1937, produisirent de la gobeleterie.
« Le ‘MusVerre’ fait partie de ces lieux qui contribuent à vous offrir une vision renouvelée d’un savoir-faire, hérité de nos ancêtres, le soufflage du verre, technique à la base de la création des épis de faîtage et des célèbres ‘bousillés’ » (Martine Arlabosse, vice-présidente départementale, en charge de la culture et de la communication).
Ouverture : jusqu’au dimanche 04 Janvier 2026, du mardi au dimanche, de 10h à 12h & de 13h30 à 18h, le samedi et le dimanche, de 10h à 18h. Fermeture : les jeudis 25 décembre 2025 & 01 janvier 2026. Prix d’entrée (dès 26 ans) : 6€ (2€, en prix réduit / 0€, pour tous, les premiers dimanches du mois.Contacts : musverre@lenord.fr & 00.33/3/59.73.16.16. Site web : http://www.musverre.fr.
Possédant, dans un bâtiment annexe, son propre atelier, muni de deux fours, le "MusVerre" organise des démonstrations et des stages, tant pour adultes que pour enfants, dès 6 ans.
Aux visiteurs belges, nous conseillons de jumeler cette visite avec l’une ou l’autre exposition de l’événement « Fiesta », de « Lille 3000 », comme, jusqu’au dimanche 31 août, « Fêtes et Célébrations flamandes », au « Palais des Beaux-Arts », à Lille, dont la collection permanente est à découvrir, notamment pour sa section « Moyen Âge » ou encore ses « Plans Reliefs », dont celui de Namur. Autre possibilité, à Cassel, le « Musée de Flandre », qui nous présente, jusqu’au dimanche 28 septembre, « Brueghel & Van Balen, Artistes & Complices », voire, pour les amateurs de bandes dessinées, à Tourcoing, l’ « Hospice d’Havré » nous propose, jusqu’au samedi 27 septembre, « 50 Ans & déjà Immortels », une intéressante rétrospective du magazine BD « Métal Hurlant ».
Yves Calbert.